Le 6 février 2022, le Parlement irakien a reporté la séance qui devait élire le nouveau président de la République. Une absence de quorum a été constatée alors que les principaux blocs politiques avaient annoncé leur intention de boycotter la séance. La raison principale est la suspension temporaire par la Cour suprême du candidat à la présidence Hoshyar Zebari, ancien ministre des affaires étrangères et chef de file de la coalition de la souveraineté. Les dissensions qui entourent sa candidature illustrent les défis auxquels doit faire face le calendrier politique irakien.
Un dossier complexe pour Hoshyar Zebari
Accusé d’anciennes accusations de corruption, Hoshyar Zebari est maintenant tenu de prouver son innocence. Avant cela, le Parti Démocratique du Kurdistan (PDK) l’avait choisi en tant que candidat officiel pour la présidentielle. Bien qu’il soit toujours considéré comme un dirigeant important au sein du PDK, aux yeux des électeurs irakiens, il est considéré comme une figure controversée car il a occupé des postes clés sous Saddam Hussein, y compris celui de ministre de la défense. L’influence de Zebari sur la scène politique irakienne s’est accrue en 2016 lorsqu’il a été nommé ministre des Affaires étrangères du gouvernement d’Haïder Al-Abadi. Sous sa direction, le gouvernement a réussi à contenir le groupe terroriste Etat islamique et à renforcer ses relations internationales. En 2020, il a été élu député au Parlement irakien, ce qui lui a permis de concourir pour le poste de Président. Toutefois, sa candidature a été mise en suspens dimanche par la Cour suprême et a provoqué un malaise politique considérable.
Dissensions politiques et menace terroriste
Depuis 2003, les juges irakiens font l’objet de menaces constantes de la part de groupes terroristes, de criminels et de milices. Ces menaces ont eu des conséquences graves et 74 juges ont été assassinés entre 2003 et 2019. La pression exercée sur les juges pour faire face à la corruption et à l’inconduite est considérable et certains d’entre eux ont été victimes de tentatives de corruption. Avec la situation actuelle d’instabilité et de polarisation politique en Irak, les barons de la politique ont été incapables de former un gouvernement depuis les élections législatives d’octobre 2020 remportées par le courant sadriste. De plus, la pandémie de coronavirus a exacerbé la crise humanitaire et sociale en Irak.
En outre, la menace terroriste représentée par l’Etat Islamique reste persistante et nécessite un leadership fort pour la restauration de la sécurité et de la stabilité dans le pays.
La nomination de Hoshyar Zebari à la présidence était une question controversée et compliquée dans la mesure où elle impliquait d’un côté la promotion d’un leader recommandé par Massoud Barzani, le président du Parti Démocratique du Kurdistan, et de l’autre, l’insistance de la justice pour clarifier les accusations portées contre lui. En attendant, la formation d’un nouveau gouvernement sera encore plus difficile car le processus de sélection du président a été repoussé.
Les défis à relever pour la construction nationale en Irak
L’une des limites à la construction nationale en Irak est l’incapacité à empêcher l’intimidation et la corruption de s’infiltrer dans le système judiciaire du pays. Les tribunaux irakiens devraient fonctionner dans un environnement sûr, mais les juges ont été ciblés par des groupes terroristes, des criminels et des milices, et le gouvernement a pris des mesures limitées pour les protéger. Malheureusement, les juges ne sont pas seulement les victimes de cette situation ; ils peuvent être également des transgresseurs, accusés de corruption, de négligence et de politisation. La réforme de la branche judiciaire est donc aussi difficile à mettre en œuvre que tout autre aspect du système politique irakien.
- De 2003 à 2023, 74 juges ont été assassinés en Irak.
- Des blocs politiques importants ont boycotté la séance parlementaire visant à élire le président.
- Le candidat à la présidence, l’ancien ministre des affaires étrangères Hoshyar Zebari, a été suspendu temporairement par la Cour suprême.
- Le nombre de juges en Irak est beaucoup plus faible que les normes internationales.
L’un des grands défis à relever pour l’Irak est la résolution de cette crise politique qui bloque la mission de construire un Etat démocratique et de rétablir la sécurité et la stabilité au pays. Pour atteindre cet objectif, des solutions urgentes doivent être trouvées pour réformer la branche judiciaire et instaurer un climat propice à la lutte contre la corruption et l’intimidation. La nomination d’un nouveau chef de l’État adéquat pourrait être la première étape vers une plus grande cohésion et une meilleure stabilité. Avec les élections municipales prévues en 2023 et les élections générales prévues en 2024, le temps presse pour le Parlement de s’accorder sur un nouveau président et de relancer le processus de formation d’un nouveau gouvernement.